Skip to main content

Krijn Giezen (1939-2011)

Biographie

Krijn Giezen est né en 1939 à Noordwijk aan Zee (Pays-Bas), décédé à Magny-en-Bessin (France) en 2011. Il a vécu depuis 1989, en France, à Magny en Bessin sur la côte Normande.

De 1956 à 1961, il fait ses études à l’Académie Royale des Beaux-Arts de La Haye, section Dessin et Peinture.

Il a enseigné pendant plusieurs années à l’Institut d’Art de Rotterdam et de La Haye ainsi qu’à l’Académie d’État des Beaux-Arts d’Amsterdam.

Ses œuvres, où la dimension sociale joue un rôle prépondérant, prennent en compte le paysage urbain ou naturel et sa transformation due à l’activité des hommes mais aussi au processus de croissance et de dépérissement. Dans son travail la forme n’atteint jamais un état stable et définitif. Ainsi ses œuvres apparaissent à différents moments de leur existence dans une phase de leur processus toujours en évolution assimilable à la vie elle-même.

Créations dans le paysage

Kijk Uit / Attention ! dans le parc des sculptures du musée Kröller-Müller, 2005. Otterlo (Pays-Bas)

Le titre de cette œuvre Attention ! joue sur la polysémie du mot : prêter attention, porter le regard sur, aussi bien que faire attention, être prudent.

Un escalier monumental se dresse vers le ciel. Le paysage qu’on découvre à son sommet s’étend sur plus de 40 km et dévoile le parc naturel de Hoge Veluwe. Une vue du paysage est présenté dans une vidéo à l’intérieur du musée comme une « image impressionniste ».

Krijn Giezen sollicite une appropriation physique de ses sculptures. C’est son souhait. L’oeuvre es tune expérience à vivre. Les visiteurs ont la possibilité d’effectuer un parcours d’environ 250 m qui commence tout à fait en bas, au niveau de la sculpture Ramure (1928) de John Raedecker et se poursuit en droite ligne jusqu’au sommet de l’escalier. D’abord les marches sont en béton et reposent sur un édicule, le Franse Berg (le mont français), puis se prolongent, à travers la forêt, par un escalier en bois qui monte graduellement vers les sommets des arbres. Cette élévation proposée par Krijn Giezen est à la fois physique et spirituelle. Elle rappelle la métaphore biblique, celle de l’échelle de Jacob, qui établit un lien entre le ciel et la terre, et qui a inspiré notamment le célèbre discours de Martin Luther King « I have a dream ».

Cette construction est prévue pour suivre la croissance des arbres. La partie de l’escalier réalisée en bois recyclé (basracolus) mesure actuellement 80 mètres de long et peut être rallongée au fur et à mesure, anticipant ainsi la croissance des arbres. C’est le sens même de ce  projet.

Cette œuvre est à l’origine une commande du parc de sculptures Kröller-Müller à Otterlo (ville du centre des Pays-Bas). Le projet a été conçu en 1986 par Krijn Giezen mais c’est seulement vingt ans plus tard qu’il a été réalisé.  Les propositions de Krijn Giezen, par leur audace, rencontrent souvent les réticences des Institutions même lorsque ces dernières lui ont passé commande.

Le projet actuel ne reflète plus tout à fait le projet initial de l’artiste. Après la mort de Krijn Giezen en 2011, l’escalier a été transformé par une décision du Musée. Une action est en cours pour réhabiliter l’œuvre dans son état d’origine.

Bunkers recyclés le long de la côte ouest du Danemark, 1995. Thyboron (Danemark)

Pendant la 2ème Guerre Mondiale le régime Nazi a construit des blockhaus le long des côtes de l’Europe. Il s’agissait de lignes de défense militaire pour résister à d’éventuelles offensives venant de la mer ou à des tentatives de débarquements. Des exemples de ces ouvrages subsistent encore aujourd’hui un peu partout sur les plages de l’Atlantique et de la Baltique, comme à Thyboron au Danemark.

Cinquante ans plus tard, en 1995, dans le cadre du symposium Fredsskulptur (Sculpture pour la paix) Krijn Giezen recycle les Bunkers de Tyboron en leur octroyant un nouveau rôle : celui de protéger la zone côtière contre l’érosion marine. Des fragments de blockhaus éclatés ont été coulés dans des cubes de béton – chaque bloc pesant 4 tonnes. Ils sont disposés pour jouer désormais la fonction de brise-vague. Ce Bunker recyclé se dresse maintenant pour protéger la côte danoise contre l’action de la mer et des forces naturelles. L’artiste détourne ainsi la fonction initiale d’un ouvrage guerrier dans une métamorphose pacifique.

Sur chaque bloc est gravée la date du 5 mai 1995.

Mémorial pour La Défense, 1994. Paris la Défense (France)

En 1994 les Ateliers Internationaux de CERGY-PONTOISE  ont pour thème : La ville et la nature : le grand axe de la Défense – prolongement vers l’ouest. Deux artistes sont invités : Krijn Giezen et Richard Nonas.

La proposition présenté par Krijn Giezen qui s’intitule : Mémorial pour La Défense est fondée sur l’idée du cycle : construction / destruction.
Après 30 années d’existence, les premiers immeubles de bureaux du quartier d’affaires de La Défense commencent à être démolis et sont remplacés par de nouveaux. Cette observation donne l’idée à Krijn Giezen de proposer la récupération des matériaux suite à ces destruction de bâtiments et de leur donner un lieu de repos dans l’une des carrières abandonnées, de l’autre côté de la Seine, située sur l’axe s’étendant à l’ouest. Beaucoup de matériaux tels que sable, gravier, argile, qui ont servi aux constructions, en sont la provenance. En les extrayant des carrières, des «blessures» ont été  infligées au paysage. L’idée du retour des matériaux dans leur site d’origine est une façon de panser les plaies infligées au paysage et de boucler ainsi un cycle. Le thème de l’Atelier intitulé «Ville et Nature» devient « Ville retour Nature ».

A l’occasion de ce projet, Krijn Giezen a produit Livre-Axe,  un ouvrage à soufflet que l’on développe comme un accordéon (Leporello),  comprenant des dessins et des collages originaux. Lors de sa présentation aux Ateliers Internationaux de Cergy-Pontoise il  a déroulé ce livre dans un geste traçant une ligne qui rappelle l’axe.

Paroi botanique anti-bruit dans la zone portuaire de Rotterdam, 1991. Rotterdam (Pays-Bas)

Avec de la terre, des gravats et divers autres matériaux provenant des routes et des bâtiments démolis lors de l’extension du port de marchandises de Rotterdam, l’artiste Krijn Giezen a créé la Paroi botanique anti-bruit.  Les matériaux récupérés, à l’exception des matériaux polluants, ont été déversés, par les entreprises de travaux publics chargées de la démolition du site, dans une gigantesque cage en treillis d’acier de 300 m de long, sur 6 m de haut et 3,50 m de large, dessinée par Krijn Giezen. L’ouvrage est destiné à protéger et isoler le village voisin de Rhoon de la vue et des bruits de l’activité portuaire. La forme sinueuse donnée à cette muraille assure sa stabilité. Le mur a une fonction acoustique performante et constitue en outre un ouvrage écologique. Avec le temps apparaitront et se développeront une flore et une faune spontanée. Cette muraille évolue au rythme des saisons. L’œuvre n’est pas figée. Cette Paroi botanique anti-bruit a sa propre vie. Un groupe d’étudiants en botanique a été mobilisé pour en suivre l’évolution et observer ses changements.

Le processus de réalisation a débuté en 1991. Il a été achevé, pour une grande part, en 1993. D’autres éléments additionnels pourraient venir s’y ajouter plus tard. Krijn Giezen les a programmés. C’est ainsi que dans la maquette originale figure une cafétéria sur la ligne de crête du mur. Elle  serait fabriquée avec des conteneurs maritimes. On y accèderait par un escalier. Elle offrirait une vue panoramique sur le paysage alentour.

Glasshouse et Promenade dans la prison de Grittenborgh, 1989. Hoogeveen (Pays-Bas)

Dans la cour de la prison de Grittenborgh à Hoogeveen, un élément vitré et transparent, la serre, est introduit au milieu des formes rigides des bâtiments et de l’enceinte. La matière transparente, donc ouverte, est placée en contraste avec les murs en béton opaque. Une ligne droite, la promenade, mène à l’orangerie et la traverse au beau milieu. A côté de la serre il y a un jardin potager avec des arbres fruitiers, le tout entouré des murs de la prison. Vue d’en haut, l’œuvre se présente comme un relief avec des couleurs et des structurent qui se transforment au gré de la croissance et du dépérissement des végétaux.

L’activité humaine, se promener, cultiver, fait partie de l’œuvre. Celui qui l’utilise prend part à sa création. Les fruits et les légumes cultivés sont consommés par les prisonniers et les gardiens, ou sont vendus à l’extérieur. Ce qui était dans les murs se dispersent au dehors. Le cercle biologique : cultivation – consommation – digestion est exprimé.

Dans cette réalisation il y a une interaction constante entre les notions d’intérieur et d’extérieur. Le mur de la prison devient un élément protecteur car, à l’abri du vent, les végétaux peuvent mieux croître et se développer. Krijn Giezen préfère appeler la serre « glasshouse », le mot anglais pour serre. Un mot qui contient en même temps l’idée d’intérieur (house = maison) et l’idée d’extérieur et de transparence (glass = verre).

La serre est semblable aux autres serres qui existent dans les régions horticoles de la Hollande. C’est une forme reconnaissable, ordinaire, presque classique. Dans ce travail, ce qui compte le plus n’est pas la forme de la serre elle-même  – bien que choisie et placée avec soin – mais plutôt la matière vitrée, la transparence qu’elle exprime, le contraste qu’elle crée en rapport avec la dureté des murs et des bâtiments environnants ainsi que l’élément « dehors » qu’elle suggère.

Cette réalisation n’est pas un objet, une forme stable mais se trouve en mouvement constant. Hiver-été, froid-chaud, intérieur-extérieur, comme dans toutes les œuvres de Krijn Giezen, les opposés, placés ensemble, cherchent leur équilibre.

Compostage, 1986. Leiden (Pays-Bas)

Broei (Compostage en néerlandais) est une structure habitable expérimentale fonctionnant avec le cycle des saisons. Elle est composée de 4 éléments de 6 m x 6 m et de 3 m de hauteur. Le premier élément est une structure en lattes de bois couverte de végétation grimpante évoluant suivant les saisons. Le deuxième élément est une forme très rigide construite avec des plantations denses et élaguées servant d’habitation d’été. Un troisième élément a été créé avec des copeaux de bois et des végétaux récupérés provenant de la structure d’habitation d’été. C’est le compostage qui va servir à produire la chaleur pour l’habitation d’hiver (quatrième élément). Dans ce dernier espace une machine souffle de l’air chaud et expulse l’air refroidi. L’ensemble de cette œuvre évoque à la fois un lieu d’habitation et un lieu de production. C’est aussi un habitacle écologique, en transformation constante, obéissant aux cycles des saisons.

Ce projet expérimental a été conçu dans le cadre d’un concours lancé en 1986 à Almere aux Pays-Bas sur le thème « habitations alternatives », pour lequel Krijn Giezen a reçu le troisième Prix avec sa proposition: Compostage, vivre avec le cycle de la nature. Ce projet a été réalisé huit ans plus tard, en 1994, dans un parc éducatif sur la commune de Leiden.

Krijn Giezen a été un des premiers artistes à intégrer dans son travail des préoccupations écologiques. Toute son œuvre en est profondément marquée. Il a influencé les nouvelles générations d’artistes aux Pays-Bas.

Bois de Franeker, 1986. Friesland (Pays-Bas)

Staatsbosbeheer (Administration des Eaux et Forêts) voulait planter un bois près de Franeker. A cette occasion Krijn Giezen (1939-2011) avait été invité à y créer une œuvre d’art. Plutôt que d’installer une sculpture-objet il a proposé de dessiner le bois en collaboration avec Bertus de Jong, ingénieur agronome. Dans cette œuvre « Franeker bos » (Bois de Franeker) des éléments très anciens existants dans le paysage de Friesland (un tertre historique et le site d’un state-manoir) sont évoqués, en même temps qu’elle annonce la pensée écologique d’aujourd’hui (action de recyclage).

Le plan du bois dessiné par Krijn Giezen a la forme régulière d’un site de « state ». Les murs vétustes du quai de Franeker (cassés en morceaux) ont été réutilisés pour préserver les usagers du bois contre les nuisances visuelles et sonores d’une route nationale à proximité. Les deux corps du mur sont unis par un tertre-point de vue. En montant le tertre on peut jouir d’une vue lointaine sur le paysage environnant, le bois d’un côté et le polder de l’autre. L’ensemble s’étend sur une superficie de 20 hectares.

Bertus de Jong, ingénieur agronome, a choisi les espèces d’arbres et effectué leur plantation. Œuvre d’art commandée et réalisée par Staatsbosbeheer.

Aquarelles (2000-2004)

Pendant un voyage de la Hollande jusqu’à Cherbourg pour suivre le mur de l’Atlantique, Krijn Giezen découvre la côte Normande.

Entre 2000 et 2004 il peint des aquarelles en séquence, influencées par le vent et la pluie. Il s’immerge dans le paysage et rend les lieux vivants en le peignant. Je suis pense-il alors un «impressionniste».